Troisième dimanche de Carême

Auteur: Stéphane Braun
Date de rédaction: 20/03/22
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : C
Année: 2021-2022

Des galiléens massacrés par Pilate, 18 personnes mortes dans l’effondrement d’une tour en construction dans l’enceinte de Jérusalem, des faits divers qui ont dû faire du bruit à l’époque de Jésus comme beaucoup d’autres événements dans notre histoire humaine. Tous ces morts innocents étaient-ils plus coupables ou pécheurs que d’autres habitants de Galilée, de Jérusalem ou de notre monde ? « Ces gens méritaient-ils la mort ? » demande Jésus à ceux qui l’interpelaient.

Dieu serait-il impuissant, responsable de non-assistance à personnes en danger ? Ou serait-il à l’image de ces dictateurs sûrs d’une vérité qu’ils veulent imposer aux autres ? Et ceux qui ne sont pas d’accord méritent alors la mort.

Qui est et où est Dieu dans toute ces violences, ces mort brutales, sans compassion, sans au revoir, sans communication, je dirais presque sans humanité ?

« Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même ! » nous dit Jésus dans l’évangile. La fidélité à Dieu serait alors nourrie par la peur pour sa propre vie ?

Et puis, cette parabole d’un figuier pas tout à fait à sa place dans une vigne.

Les paraboles ne sont pas des histoires pour enfants. Leur but est de nous faire entrer dans une expérience de la réalité de Dieu par le biais d’une histoire familière.

Le figuier n’a pas été planté. Mais était là quand on a planté, bien alignés, les ceps de la vigne. Il ne dérangeait pas trop et pourrait donner quelques figues. Mais il a grandi et voilà déjà trois ans qu’il ne produit pas de fruits. Le propriétaire de la vigne demande alors au vigneron de couper ce figuier pour le remplacer par quelques ceps de vigne. Le maître de la vigne souhaite l’élimination du stérile, de celui qui n’a pas de rendement, de celui qui dérange dans le bel alignement des ceps.

Intervient alors le vigneron qui s’adresse à son maître : Patience, mon seigneur, laisse-moi encore un peu de temps pour m’en occuper. Laisse-moi dégager ses racines qui ne parviennent plus à à se nourrir dans les cailloux. Laisse-moi bêcher à son pied et lui apporter un peu de terre fertile. Et laisse-lui le temps de reprendre gout à la vie pour te donner du fruit.

IL y a beaucoup de figuiers autour de nous et dans les vignes du monde. Ils s’appellent François, Alice, Hamed, John, Sergey, etc.… 

Pas un n’a poussé et porté du fruit au même rythme que les autres. Il y a dans nos histoires, aussi bien les fruits de l’hiver que ceux de l’été et parfois aussi de longues périodes d’attente des fruits. Et quand on croit le rameau desséché, peut survenir l’espoir du bourgeon et de la fleur du printemps.

Il est là, notre Dieu Amour, source du sens de notre vie, ce Dieu entré dans notre histoire humaine pour nous entrainer avec lui dans une expérience de bonheur. Le vrai bonheur, celui qui nous prend aux tripes, celui qui nous donne envie de courir, de chanter très fort, de s’émerveiller, de s’embrasser et parfois aussi de pleurer.

Ce vrai bonheur, c’est celui d’être aimé et d’aimer à notre tour. C’est ce bonheur-là qui donne sens à notre vie et non la peur des menaces de mort d’un tyran si l’on quitte les rangs qu’il a tracé !

Et si Dieu était un maître de la vigne ? Patient, mais avec des limites ; exigent, mais laissant libre. Un maitre amoureux de sa vigne mais qui a besoin du vigneron et lui fait confiance.

Et si Dieu était un vigneron ? Attentif à celui qui est étranger, qui n’est pas bien aligné, encombrant dans la croissance la vigne. Un vigneron qui demande la patience pour celui qu’on croit stérile et surtout, qui demande la confiance pour s’occuper du figuier.

Et si Dieu était figuier ? Il est là, dans la vigne de notre humanité. On ne sait pas trop comment il est arrivé là. Il dérange, il encombre et commence à prendre trop de place. Certains aimeraient bien s’en débarrasser.

Et si la vigne, le vigneron, le figuier et même plus, étaient ensemble quelque chose de Dieu ? Ce quelque chose qui nous est donné, nous habite, structure nos relations humaines, et peut donner sens à notre vie et à celle des autres.

Chers frères et sœurs, demain c’est le printemps. Les saules commencent à verdir, les jonquilles sortent de terre, les terrasses se remplissent.

Dans trois semaines, c’est Pâques, la fête de la Fécondité, de la Vie qui ne meurt pas en nous étant confiée. C’est une grande responsabilité d’être acteur de la parabole, en étant tour à tour et à la fois, vigne, maître de la vigne, vigneron et pourquoi pas aussi le figuier qui a besoin des autres pour exister.

Amen